Toute vie vaut la peine
Le risque que la France légalise bientôt l’euthanasie ou le suicide assisté est élevé. Or, je vois chez certains pratiquants une rhétorique que je connaissais déjà pour l’avortement : « Mon père, merci de nous dire que toute vie est sacrée, mais dans ce cas précis, vous comprenez n’est-ce pas » ? Non, je ne comprends pas. Philosophiquement, cette thèse est suicidaire. Si je dis d’un seul embryon non désiré (celui que ma sœur a choisi de laisser naître quand elle avait 18 ans), d’un seul vieillard Alzheimer (ma mère il y a un an), d’un seul sans-papier en Méditerranée, que celui-là il faut qu’il meure (« soyez réaliste mon père » !) alors ma vie ne vaut que sous conditions, et ces conditions, elle ne les remplira pas toujours. En Belgique, il est devenu classique de se faire euthanasier pour des problèmes moins graves que ceux que j’ai (« soyez réaliste monsieur le paroissien »). À ce jeu, la mort gagne à tous les coups.
Ce système compte beaucoup dans le fait que presque tous, nous nous demandons à quoi nous servons, si nous sommes assez compétents, assez jeunes et que sais-je ! Théologiquement comment oublier que cette logique a tué le Christ ? « Il vaut mieux qu’un seul homme meure pour le peuple » (Jn 11, 50). Pilate, lui a exécuté un homme qu’il savait innocent pour garantir le maintien de l’ordre (« soyez réaliste, mon père »). Jésus l’a voulu pour rejoindre tous ceux qui sont traités ainsi. Pour dénoncer les réalismes de mort. Et pour dire à tous ceux qui cautionnent ces carnages que même en eux la vie est encore capable de se révolter et de trouver miséricorde.
« Je mets devant toi la vie ou la mort, (…). Choisis donc la vie » (Dt 30,19).
père Matthieu Villemot, vicaire