Sainte Famille
Après le rapport de la CIASE que certains catholiques ont nié alors qu’il nous accule à la réforme, la commission sur l’inceste en France a rendu son rapport : chaque année en France, 160 000 enfants sont victimes de violence intrafamiliales. Si j’excepte le témoignage courageux d’Emmanuelle Béart dans la Croix, les réactions sont quasi inexistantes. Pourtant, que signifie une défense catholique de la famille qui ferme les yeux sur la violence conjugale, parentale, l’inceste, les enfants séquestrés, ou jetés à la rue parce qu’ils sont LGBT (j’en connais) ? Que signifie un culte de la sainte famille qui oublie cela ? Dans Amoris Laetitia, le pape nous a demandé de nous mobiliser :
« C’est la présence (…) de la violence qui brise la vie de la famille et son intime communion de vie et d’amour. (…) S’il est juste et légitime de rejeter de vieilles formes de la famille ‘‘traditionnelle’’, caractérisées par l’autoritarisme, y compris par la violence, cela ne devrait pas conduire à la dépréciation du mariage mais à la redécouverte de son véritable sens. (…) La violence honteuse qui parfois s’exerce sur les femmes, les abus dans le cercle familial (constituent) une lâche dégradation. La violence verbale, physique et sexuelle qui s’exerce sur les femmes (…) contredit la nature même de l’union conjugale ».
François explique aussi que tolérer la violence intra-familiale, c’est se condamner à la retrouver ailleurs. Que cessent nos « vous exagérez, c’est pas si grave, ça a toujours existé, n’en parlez pas, l’essentiel c’est de rester ensemble » et autres. Mes parents, vers 1965, ont aidé ma tante à quitter un foyer violent. Ce n’était pas la mode. 55 ans plus tard, son fils en pleurait de gratitude devant moi sur la tombe de sa mère. Il faut que des catholiques prennent ces combats à bras-le corps, sans quoi nous aggraverons le naufrage des familles. Nous n’avons pas tous et chacun la vocation de nous en occuper dans des associations. Mais prier, s’informer, rester vigilants, signaler, ce sont nos devoirs à tous. Frapper sa femme c’est frapper la Vierge. Violer son enfant, c’est planter la lance dans le Cœur du Christ. Mais puisque le Christ s’est rendu présent même à ces situations comme à toute pauvreté, il nous donnera la lumière et la force, si nous l’acceptons, pour les dénoncer et les combattre. Il rejoindra les victimes dans leur détresse pour les conforter. La violence intrafamiliale n’est pas une fatalité.
Père Matthieu Villemot, vicaire